Histoire du soldat inconnu

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Un film de voyant qui, alors que les hommes politiques font des discours pacifistes, a senti et vu que toutes ces conférences sur la paix préparaient inéluctablement la guerre fraîche et joyeuse comme la précédente.

Ce féroce rassemblement d’images où civils et militaires n’arrêtent pas de défiler, dénonce /’ alliance du sabre et du goupillon, les bénisseurs de gerbes, les tribuns essoufflés, les inaugurations de monuments aux morts. Un vaste rassemblement de guignols qui tirent les ficelles du monde et les coups de canon, métaphorisés par des bâtiments qui s’écroulent et des chantiers de fouille où l’on déterre des charniers. Cette violence synoptique et syncopée des images est, dans la version sonore, renforcée par d’ironiques marches funèbres, musiques militaires ou airs légers.

 

 

Images : Extraits de journaux d’actualités de 1928-1929

Montage : Henri Storck

Carton : « Ce film est un montage d’actualités de 1928, l’année du pacte Briand-Kellogg qui déclarait mettre la guerre hors la loi. »

35mm/N&B/10 minutes/1932 (sonorisé en 1959 à l’initiative de la Cinémathèque royale de Belgique)

Interdit par la censure française en 1932

 

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Vigoureux film pacifiste dans lequel se dévoile l’hypocrisie des politiciens.

Ado Kyrou, Le surréalisme au cinéma, Edition Le Terrain vague, Paris, 1963.

 

La structure de ce film est née du conflit entre une idée utopique, la mise hors la loi de la guerre et les dépenses insensées consacrées à une défense militaire qui allait s’avérer dérisoire en 1940. Le citoyen, les anciens combattants étaient trahis. La der des der comme on disait alors n’était plus qu’un mythe. Le symbole du citoyen anonyme c’était bien ce pauvre soldat inconnu, issu du bas peuple, et qui avait donné son sang pour défendre sa patrie. Maintenant était venu le temps des marchands de canon, grâce à la politique des grands pays. Mais le pauvre soldat inconnu, assassiné comme une bête, on ne cessait de lui rendre des honneurs, on l’enterrait en grande pompe… Ce film n’a pas de commentaire. Il est une galerie d’hommes politiques et de chefs d’Etat.

Au passage on reconnaît Aristide Briand, le président Doumergue, Paul Prudent Painlevé, le préfet de police Chiappe, Maginot, Mussolini, le prince Umberto, le Régent de Hongrie, Horthy, Poincaré, les présidents Lebrun, Tardieu, le maire de Lyon Herriot, le lord-maire de Londres, Alphonse XIII Roi d’Espagne, Ramsay Mac Donald, le prince de Galles, le maréchal Pétain, le président Hoover, Streseman, le président du Mexique, Foch, Kellog sénateur américain qui signa un pacte qui lui valut le prix Nobel de la paix.

Henri Storck,1959.

 

Histoire du soldat inconnu est à l’époque interdit par la censure française. Il s’agit d’un pamphlet sarcastique contre l’armée, l’église, le capital. Ici Storck dénonce la menace du réarmement, l’ascension de diverses dictatures, l’inutilité des traités de paix et préjuge la funeste menace hitlérienne. Finalement une authentique actualité cinématographique. Aucun acteur n’était-ce les obscènes apparitions du pouvoir; aucune mise en scène n’était-ce celle des parades militaires et des ornements sacrés.

Michele Canosa, Henri Storck, il litorale belga, Campanotto Editore, Udine, 1994