Le saigneur est avec nous

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Prix de la Presse—Lucien Deroisy au 10e Festival National .du Cinema Belge, Bruxelles 1974

 

1974, 16 mm, noir et blanc, 90 min

Réalisateur : Roland Lethem
Scénario : Roland Lethem
Images : Claude Neckel, Jean-Jacques Mathy
Montage : Roland Lethem
Production : Natacha Schinski
Conseiller en sciences pornographiques : Georges le Gloupier
Interprétation : Claude, Micheline, Serge, Christian, Charlotte van klatchpatat, Jean-Marie Buchet, Baïla, Lyland Dyen, Claude Raskin, Francis Peuvion

 

C’est le dernier film interdit par Franco.

« Le Saigneur est avec nous » (1974) obtint le Prix Lucien Deroisy au Dixième Festival national du film belge. Le sous-titre « in memoriam Alfons Vranckx » indique bien qu’il s’agit d’un pamphlet sur le fascisme ici représenté par un ancien ministre de la Justice, qu’une jeune fille parvient à envoûter afin qu’il abandonne la politique. Déjà objet de censures et scandales divers, Roland Lethem est alors convoqué au ministère de la Justice. Le film commence par une allocution télévisée du ministre, auquel le réalisateur supprime la voix et accole les versets d’une messe radiodiffusée. Procédé qui relève du collage surréaliste, largement utilisé tout au long du film, dont la première version durait un peu plus de deux heures, mêlant scènes jouées, reportages, interviews reconstituées, pastiches publicitaires, extraits de films trouvés dans les poubelles de cinémathèques, actualités nazies, dessins animés, inscriptions sur la pellicule, bandes érotiques, et même des bribes de « Bande de cons! », son film précédent, dont le Saigneur est avec nous est en quelque sorte la suite logique (le film commence où l’autre se termine, par une injure directement adressée au spectateur). Comme plusieurs leitmotive entrecroisés, les plans reviennent à intervalles irréguliers, ainsi que toute une série de versions chantées ou orchestrées de l’Internationale. Montage complexe, techniquement surprenant, ces Mystères du combat contre l’oppression et pour la liberté mettent le spectateur une fois de plus devant sa propre image. L’allusion vampirique du titre n’étonnera personne, quand on sait que quasiment tous les films de Lethem prennent comme sujet et comme effet provocateur ce substitut sexuel, ainsi que son corollaire la castration (la Ballade des amants maudits, la Fée sanguinaire, le Sexe enragé…).

Boris Lehman.

 

« Le Saigneur est avec nous » je l’aurais intitule « A. V. les Mystères du combat contre l’oppression et pour la liberté »

Boris Lehman, Clés sous le spectacle, juin 1974.

 

Avec ce film-collage à la manière des surréalistes, mêlant scènes jouées, pastiches publicitaires, extraits de films trouvés dans les poubelles de cinémathèque, actualités nazies, dessins animés et bandes érotiques, Roland Lethem espérait bien ajouter une provocation de plus à son palmarès. C’est une manière de prolongement à son précédent film, « Bandes de cons ! », dont la première projection avait provoqué une bagarre générale (avec couteau) : il s’agissait de quatre plans fixes de vingt minutes chacun montrant un doigt s’introduire lentement dans une narine sur fond sonore de halètements obscènes. Dans « Le saigneur », le spectateur est promené dans un discours polymorphe, éclaté, avec ses moments d’anthologie, tel cette appétissante (fausse) interview de Jean-Marie Buchet, collectionneur de vieux tampons hygiéniques. Pamphlet sur le fascisme (le Ministère de la Justice ne s’y est pas trompé, qui pria l’auteur de venir s’expliquer en ses bureaux), »Le saigneur » est avec nous met une fois de plus le spectateur devant sa propre image.

Nova-cinéma, Le saigneur est avec nous, 2012