Regard complice jeté sur le travail et sur les fantasmes de l’un des principaux peintres du groupe COBRA. Alechinsky pour qui le dessin est devenu
une écriture, dont la main découvre une sorte d’alphabet, contourne les choses, leur donne un
nom au fil de l’encre et de l’eau. Un film sur l’urgence de l’acte créateur.
Ce film comporte des dessins animés réalisés par Alechinsky à partir de vieilles photos
et de cartes postales. Avec la participation d’Alechinsky.
1970. 35 mm., couleur, 20′
Coproduction: Luc de Heusch (Bruxelles) et Albina-production (Paris)
Réalisation: Luc de Heusch
images: Denys Clairval
Animation: Alechinsky chez Arcady
Montage : Nicole Berckmans
Musique: Michel Portal, Jean-Pierre Drouet, Barre Philips
Avec la voix de Claude Rich
Distinctions: grand prix du film de fiction au 3e festival du film belge, Anvers, 1958;
Premier prix du festival international organisé par le congrès mondial d’urbanisme à Porto Rico, 1960.
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C’est en 1971 que j’ai tourné ce film, en complet accord avec Alechinsky, alors dans sa pleine maturité. Vous avez pu voir Magritte, Dotremont-les-logogrammes et Alechinsky tout récemment cette œuvre triomphale, superbe exposée au Musée d’Art Moderne. Je n’ai donc pas beaucoup de commentaire à faire; je voudrais simplement préciser les règles du jeu cinématographique. Comme pour Dotrernont, et à l’inverse de Magritte, il est évident que le processus même de la création, le jeu risqué avec la toile nue, devait constituer le nœud du film.
Le tableau réalisé sous les yeux de deux caméras, fut parfaitement réussi et, par conséquent, nous n’avons pas dû recommencer l’expérience. Il s’inspire du thème des Gilles de Binche. Un mythe collectif a sous-tendu toute l’entreprise de COBRA.
Nous avons cru -à tort ou à raison -que la création spontanée individuelle était susceptible de rejoindre l’inconscient créateur collectif. Je pense aujourd’hui que nous nous trompions absolument, mais cela n’a aucune importance. De ce mythe fondateur de COBRA le Gille de Binche était en quelque sorte le paradigme. Ce personnage a souvent hanté l’imaginaire de Pierre Alechinsky.
Ici aussi je tente d’évoquer sans tomber dans le didactisme un univers poétique qui se place sous le signe de la dérision et de l’angoisse de la mort.
Luc de Heusch Bulletin-Palais des Académies, 5è série-Tome LXX, 1988 5-9
Le film que Luc de Heusch a tourné sur Alechinsky est un modèle du genre ( … ) de Heusch à qui l’on doit déjà un magistral Magritte saisit en profondeur l’extrême liberté maîtrisée d’Alechinsky. ( … ) Alechinsky, hors de tout exhibitionnisme, traque sa propre vérité par le trait et la tache, sur l’écran, par la grâce d’un cinéaste attentif, sensible et cultivé, le mouvement créatif nous est donné à la fois analysé et restitué dans sa totalité.
Freddy Buache in la tribune de Lausanne, 14 février 1971